Portrait ParHants #6 - Magali
- ParHants
- 31 oct. 2019
- 5 min de lecture

C’est à présent au tour de Magali de nous livrer un peu de son accouchement et de son quotidien dans le portrait. Parfois l’accouchement peut être difficile, prématuré et ce, indépendamment du handicap. Je vous laisse découvrir son témoignage.
1| Peux-tu te présenter?
Je suis Magali, une maman célibataire de 38 ans, celle d'Ulysse, qui vient d'avoir 1 an et demi. En 2006, j'ai fait une chute de 6 étages, à la suite de laquelle je suis devenue tétraplégique incomplète c6-c7. Je peux dire que je ne m'en sors pas si mal au vu de la gravité de mon accident! Pendant de nombreuses années j'ai erré ne sachant plus quoi faire de ma vie, alors que j'étais diplômée d'une grande école de commerce international. Depuis peu j'ai enfin des projets concrets, tels que l'écriture d'un livre autobiographique, bien qu'il en soit encore à ses prémisses, et la construction d'une maison. Pour l'instant, nous vivons chez mes parents jusqu'à ce qu'Ulysse ait au moins 2 ans 1/2 et puisse ne serait-ce que grimper tout seul sur mes genoux. Ce n'est pas tous les jours évident de vivre avec ses parents à 38 ans, mais en tant que maman célibataire, c'est le seul choix qui s'est présenté à moi.
2| Comment s'est passée ta grossesse?
Mon handicap ne m'a posé aucun problème pour tomber enceinte d'Ulysse naturellement. Durant toute ma grossesse, je n'ai eu aucun suivi particulier, celle-ci n'ayant pas été considérée comme étant à risque. J'ai tout de même eu quelques soucis de santé liés au handicap : j'ai fait une phlébite assez sévère, pour laquelle j'ai été traitée du 4ème mois de grossesse jusqu'à la fin. J'ai aussi fait deux pyélonéphrites, pour lesquelles j'ai été hospitalisée une petite semaine à chaque fois. L'avantage, c'est que je pouvais entendre le cœur de mon tout petit tous les jours, grâce au monitoring effectué systématiquement en cas d'hospitalisation. Mon bébé, de son côté, s'est porté comme un charme jusqu'à la fin. Sauf que ma grossesse n'a duré que 6 mois et 10 jours.
3| As-tu bénéficié d'un accompagnement particulier pour ta grossesse?
Jusqu'au 4ème mois, il était prévu que j'accouche à Lorient, dans une maternité qui n'était pas particulièrement habilitée à suivre des femmes enceintes en situation de handicap. L'obstétricien que j'ai choisi, un peu par hasard, avait tout de même suffisamment d'ancienneté pour avoir suivi quelques femmes enceintes handicapées. Il était prévu, préférable même, que j'accouche par voix basse, avec l'aide d'instruments pour extraire mon bébé au cas où je n'arriverais pas à pousser suffisamment. J'ai évoqué la possibilité d'une césarienne. Après tout, on ne sait jamais, aucune femme n'est à l'abri de passer par là. Cette option a été écarté au début de ma grossesse car cela pouvait représenter un danger pour moi. En effet, quelques années auparavant, j'ai subi une entérocystoplastie, autrement dit un agrandissement de la vessie, à cause de fuites urinaires trop fréquentes. Le risque, en pratiquant une césarienne, était de toucher à la vessie en pratiquant l'incision sur l'utérus. Il était alors nécessaire qu'un urologue assiste l'opération. Au 5ème mois de grossesse, j'ai finalement été orienté sur Nantes car ils avaient des urologues ayant déjà assisté à ce type de césarienne. J'ai été logé au centre de rééducation jusqu'à ce que j'y perde les eaux à un peu plus de 6 mois de grossesse. Je suis arrivée en urgence à la maternité du CHU, et lors du monitoring, les sages femmes m'ont dit qu'Ulysse était en détresse respiratoire. J'ai été presque aussitôt conduite au bloc pour une césarienne d'urgence, en pleurs, seule et inquiète pour la vie de mon bébé. On a bien fait de me diriger vers Nantes, car même pratiqué en urgence, un urologue était présent et tout s'est bien passé. Ulysse était bien en vie à mon réveil!
4| Comment se sont passés les premiers jours avec ton enfant?
Mon cas est assez particulier du fait de la grande prématurité d'Ulysse. Je tiens d'ailleurs à préciser que même si les médecins n'ont pas su déterminer la cause de mon accouchement prématuré, ils se sont tous accordés pour dire que cela n'avait rien à voir avec mon handicap. J'ai passé une dizaine de jours à la maternité, car lors des premiers jours, la vie de mon bébé était encore en danger. J'étais dans un état second, et tant mieux, car cela m'a évité de sombrer. C'était le tout début d'un parcours difficile en néonatologie de presque 3 mois. Le lien fut difficile à se mettre en place, il a fallu attendre la sortie de cet univers médicalisé fourmillant d'infirmières pour que je commence à enfin me sentir vraiment mère.
Le premier mois, à cause de sa perfusion, son aide à la respiration, les fils de partout, je devais me contenter de rester attendre qu'une infirmière me le mette dans les bras pour le peau à peau. Même sorti de la couveuse, je ne pouvais pas le prendre sans l'aide d'une infirmière. En néonatalogie, le personnel n'est pas formé ni habitué aux mamans handicapées. Et puis nous sommes enfin rentrés à la maison! Mon père avait adapté un lit de bébé pour que je puisse lever et coucher mon fils moi-même (photos sur mon compte instagram). Pour la table à langer, j'avais simplement acheté un bureau chez Ikea, doté d'une manivelle pour l'adapter à ma hauteur ou à celle d'une personne valide. Et l'indispensable coussin d'allaitement pour y installer Ulysse, posé sur mes genoux. Cet indispensable coussin qui me suit toujours d'ailleurs et me permets de garder Ulysse contre moi aussi longtemps que je le souhaite: pas de souci de poids, aucun danger qu'il tombe, car bien maintenu... et il l'adore, son petit nid douillet sur les genoux de maman.
5| Quel regard porte ton fils sur ta situation de handicap?
Ulysse ressent mon handicap, et même si il n'a encore qu'1 an et demi, il ne le manifeste pas encore par les mots bien sûr, mais par son attitude. Lorsque je le change, depuis quelques mois déjà, il reste calme. Il ne gigote pas dans tous les sens ni ne me donne de coups de pieds, ce qu'il fait constamment avec les autres. Il sent que c'est plus difficile pour moi et il m'aide, à sa manière. Ses promenades favorites sont en fauteuil avec moi, posé sur le coussin d'allaitement, tout contre moi. Il y a le contact des corps bien sûr, à la différence de la poussette, mais je pense qu'il aime aussi se sentir bercé par les vibrations du fauteuil électrique. Peut-être qu'inconsciemment cela le ramène à ces mêmes vibrations du fauteuil qui le berçaient lorsqu'il était dans mon ventre.
N’hésitez pas à réagir à ce témoignage et à partager vous aussi vos expérience avec vos enfants.
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